Le village gaulois est en Bretagne

Articles Charlie Hebdo

Dissoud après qu’un des leurs ait tiré sur Chirac, les ex d’Unité radicale rêvent de renaître depuis leur tout nouveau camp retranché.

Avec tous les “agents du système”, les “collabos du métissage”, pas moyen de faire un salut nazi en paix. Leur “soupe aux cochon” (pensée pour filtrer entre bons et mauvais pauvres) a eu un certain succès, mais leur réunion à la gloire des “patries charnelles” attire tout juste de quoi remplir une cabine téléphonique. Et à Nice, leur manifestation contre la commémoration de l’abolition de l’esclavage a été “réprimée” par un maire UMP.

Face à l’adversité, Philippe Milliau, membre des Identitaires et ex candidat du MNR, a trouvé la solution. Entre Brest et Rennes . Un corps de ferme et 10 hectares, disponibles pour toutes activités. Ti Breizh, sa “Maison bretonne” est “un pôle de rassemblement et d’animation pour tous ceux qui veulent défendre et promouvoir une identité clairement assumée en Bretagne”. Rien à voir avec l’extrême droite jurent-ils. Pourtant, sous des variantes de dénomination, ces “nationaux-révolutionnaires” — pour ne pas dire “socialistes” —se revendiquent d’un peuple amalgamé avec ses gènes. Car, pour eux, “Le métissage détruit la diversité”.

Des grillages protègent la petite communauté des invasions des villageois indigènes. N’y sont admis que les membres. Au menu : cours de breton, potager biologique. Mais alors, à quoi servent les maîtres-chiens en treillis  ? Un fiction née de l’imagination des journalistes gauchistes de la presse régionale selon Jeune Bretagne, la déclinaison locale des Identitaires. Et pourquoi les réunions publiques ne se font pas dans la ferme ?

Il faut rechercher dans la complexité identitaire les raisons de cette discrétion. “Nous sommes les enfants de la Commune et du 6 février 1934” clament-ils. Côté commune, ils cherchent à plaire aux ouvriers en expliquant que “l’immigration est un esclavage moderne qui pille l’Afrique de ses richesses humaines et asphyxie l’Europe”. Côté 6 février, ils cultivent une adoration pour les militaires. De préférence borderline. Comme Aymeric Chauprade, enseignant de l’Ecole de guerre viré pour avoir expliqué que 11 septembre était une invention américaine. Mais aussi le lieutenant Médéric X, accusé d’avoir laissé mourir d’épuisement un légionnaire slovaque à Djibouti.

On comprend mieux les grillages et les maîtres chiens. Dans les années 80, les adorateurs français d’Hitler s’entrainaient dans un château en région parisienne. Aujourd’hui, c’est la Bretagne qui a les faveur des nostalgiques de la révolution sociale et nationale. Mais même là l’adversité les rattrape. Les habitants de Guerlesquin, le village qui accueille nos valeureux gaulois, les regardent de travers. Quant aux partisans de l’identité bretonne, qui s’expriment sur les forums de la presse régionale, ils sont limite menaçants :  “Ce n’est pas ces extremistes venus de nulle part, qui vont venir nous expliquer à nous les Bretons ce qu’est notre identité… Mais pour qui se prennent-ils ? Pour des colons ? ». Les identitaires auraient mieux fait de s’acheter une villa en Corse.

Fiammetta Venner